mercredi 9 décembre 2009

TILYAGI (Hipsters-Les Zazous) Valery Todorovsky/Russie

Les Zazous, ce sont ces jeunes gens au look excentrique et furieusement coloré, qui exprimaient leur différence, leur amour du swing, de l’Amérique (une Amérique Rêvée), dans les Années 50-60, en Union Soviétique, à une époque où l’ordre, le gris, le groupe, l’attachement exclusif à sa patrie et à la figure emblématique de Staline, étaient de rigueur…
Une Russie où « le Délit d’Attirance pour l’Ouest est puni de 10 ans de prison », où «le Jazz est un ennemi », où « le saxophone s’apparente à une arme blanche ».
Ce qui n’empêche pas le jeune Mels de quitter le chemin tout tracé et vertueux de droit camarade de la patrie, par amour pour l’originale et belle Polly. Il endosse ce look bigarré et chamarré qui lui permettra, non seulement de devenir un homme, mais aussi et avant tout musicien de jazz écumant les soirées illicites dans le « Broadway » de Moscou, poussé la fougue de sa jeunesse.
Cette fougue inaltérable de la jeunesse qui résiste, c’est aussi la fougue de la caméra de Valery Todorovsky, qui n’a rien à envier aux plus célèbres comédies musicales du « vrai » Broadway : tourbillonnements de couleurs, foisonnement d’effets malicieux de travellings et autres arrêts brefs sur image rythmant le mouvement endiablé… et une incroyable bande originale enlevée — chantée, pour moitié, par les acteurs (On pense à Pink Floyd-The Wall durant la scène de l’Université réalisée — comme la majorité des scènes — avec maestria).
Ce réalisateur possède une puissance cinématographique indéniable.

Il a fallu 2 ans pour trouver la musique du film, et 6 mois de tournage.
Le producteur Russe présent à la soirée nous explique que la musique fut composée dans les années 80, et remise au goût du jour pour cette première véritable comédie musicale Russe, qui eut un grand succès dans son pays (sauf auprès des communistes, qui nièrent l’existence des Zazous, et assurèrent que ce mouvement n’avait jamais existé). Ils ont bel et bien existé, ces Zazous, dans l’Union Soviétique des 50-60’s, donc (principalement parmi la jeunesse dorée moscovite), mais aussi dans la France des années 40 (Charles Trenet en est une figure emblématique).
Et, tels les Punks en leur temps — ainsi que tous ces groupes aux codes vestimentaires et musicaux forts et hauts en couleurs — leur envie, rage de vivre leur vie et leur différence, coûte que coûte, au défi des interdits, fait d’eux des figures contestataires et des preuves vivantes que la musique, la jeunesse, l’allure, peuvent être de grandes armes idéologiques et politiques, contribuant à la libération sous-jacente, au changement en profondeur, des esprits.
Le film se termine sur cela, en apothéose : c’est toutes les jeunesses « rebelles » de toutes les époques qui se rejoignent pour ne former plus qu’un flot de renouveau, portées par leur rêve commun.

Sarah Bouhallit
http://sadjael-bo.blogspot.com/

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